« Vue du Palazzo Ducale vers la Riva degli Schiavoni » vers 1740
Giovanni Antonio CANAL, dit Canaletto (1697-1768)
Huile sur toile-Milan Pinacoteca del Castello Sforzesco
EBLOUISSANTE VENISE !
Je suis tombée sous le charme de cette très belle exposition sur Venise au Grand Palais. Son titre est parfaitement évocateur et va de pair avec sa scénographie incroyable. Exposition adaptée aux grands, mais aussi aux petits. Allez-y en famille, vous vous régalerez !
Au XVIIIème siècle, Venise, la Serenessima Republica Di Venezia, resplendit et cette exposition en retrace les différentes facettes.
La vie publique de cette Cité-Etat indépendante, au statut de République depuis le Moyen Age, s’organise autour du Doge, élu à vie mais dépourvu de toute autorité. C’est l’aristocratie vénitienne, à travers une organisation complexe, qui dirige la Cité.
« Le Doge à bord du Bucentaure part pour le Lido le jour de l’Ascension »
Vers 1775-1777- FRANCESCO GUARDI (1712-1793)
Huile sur toile-Paris, Musée du Louvre, Département des peintures
Réputée à travers toute l’Europe pour ses festivités extraordinaires, Venise en ce XVIIIème siècle, une des villes les plus peuplées et les plus grandes d‘Europe, a une créativité artistique remarquable. Sa musique, sa peinture, ses arts décoratifs, son architecture, son art de vivre, ses sculptures…. scintillent de mille feux. Les artisans vénitiens sont réputés pour leur excellence en Europe. Ainsi de nouveaux palais, tous plus somptueux les uns que les autres, voient le jour.
« Le jardin du Palazzo Surian Bellotto à Cannareggio » vers 1780
Francesco GUARDI (1712-1793)
Chicago, The Art Institute of Chicago
La musique retentit à travers la Cité du Doge. Que ce soit dans ces nouveaux palais, où des bals et autres fêtes merveilleuses sont donnés, que dans les six théâtres d’opéras de la ville. Tous rivalisent pour créer des spectacles toujours plus étincelants.
Les ospedali, institutions caritatives où des jeunes orphelines apprennent à chanter ou à jouer d’un instrument, se produisent à travers l’Europe. Pour la petite histoire, VIVALDI a fait ses débuts comme maître de musique dans une de ces ospedali, toutes plus réputées les unes que les autres et qui n’existent qu’à Venise. Les luthiers vénitiens accompagnent avec succès cet engouement pour la musique vénitienne.
« Répétition d’un opéra »Vers 1709 Marco RICCI (1676-1730)
Huile sur toile New Haven, Yale Center for British Art
Au XVIIIème siècle, la peinture vénitienne brille avec éclat. Les paysages urbains et les scènes de la vie vénitienne inspirent ses peintres. Ces derniers ont ainsi largement contribué au mythe d’une Venise pittoresque et festive, en utilisant couleurs et lumière, qui rendent leurs peintures très séduisantes.
Sebastiano RICCI, Gianantonio PELLEGRINI, Rosalba CARRIERA, Marco RICCI, Sebastiano RICCI, Giambattista TIEPOLO, Giambattista PIAZZETTA, Antonio CANALETTO, Pietro LONGHI, Giandomenico TIEPOLO, Francesco GUARDI…. , pour ne citer qu’eux, jouent un rôle clé dans la renommée de la peinture vénitienne.
Nombre d’entre eux « s’exporteront » en Europe où ils connaitront un vif succès dans les principales capitales. Venise attire alors des étrangers fortunés, amateurs d’art et collectionneurs, qui permettront à de nombreux peintres vénitiens d’être accueillis et fêtés en France, en Angleterre, en Allemagne, en Espagne….
« Conversation entre masques » vers 1770-Pietro LONGHI (1702-1785)
Huile sur toile- Venise, Fondazione Musei Civici di Venezia, Ca’Rezzonico-Museo des Settecento Veneziano
Et c’est ainsi que Gianantonio PELLEGRINI, Marco RICCI et Sebastiano RICCI arrivent à Londres dans les premières années du XVIIIème siècle. La haute société britannique, ouverte sur le monde, apprécie leurs oeuvres.
Quelques années plus tard, de 1746 à 1755, Antonio CANALETTO, est invité, par le roi George III et sa cour, à séjourner en Angleterre. Alors qu’il répond à de nombreuses commandes, CANALETTO est séduit par la lumière et l’atmosphère des bords de la Tamise, qu’il rend avec autant de talent que la lagune.
Rosalba CARRIERA, à l’invitation de Pierre Crozat, collectionneur et mécène, se rend de l’autre côté de la Manche, à Paris. Gianantonio PELLEGRINI, son beau-frère, l’accompagne. En effet, le Régent Philippe d’Orléans lui a commandé le décor de la galerie de la Banque Royale, nouvellement créée. Gianantonio PELLEGRINI séjourne aussi en Allemagne, où, en 1713, il reçoit, entre autres, la commande du décor de plusieurs salles du château de Bensberg.
« Le Burchiello » vers 1765-1770-Giandomenico TIEPOLO (1727-1804)
Huile sur toile- Vienne, Kunsthlstorisches Museum Wien
Giambattista TIEPOLO met le cap vers l’Espagne en 1762 pour décorer la salle du trône du Palais royal de Madrid. Commande à haute valeur diplomatique, qu’il est contraint d’accepter malgré son âge avancé. Il s’éteindra d’ailleurs en 1770 à Madrid, après avoir réalisé La Gloire de l’Espagne ainsi que d’autres décors dans le Palais royal.
Mais les peintres vénitiens aiment aussi « raconter » la société et l’atmosphère vénitiennes.
Dans la seconde moitié du XVIIIème siècle, Pietro LONGHI, Giandomenico TIEPOLO (fils de Giambattista TIEPOLO) nous donnent de très beaux témoignages tant de la sphère privée pour le premier, que des foules bigarrées pour le deuxième.
« « Polichinelles et Saltimbanques » 1797-Giandomenico TIEPOLO (1727-1804)
Fresque déposée-Venise, Fondazione Musei Civici di Venezia, Ca’Rezzonico-Museo del Settecento Veneziano
Et bien sûr, Francesco GUARDI, tout autant passionné par l’atmosphère que Canaletto. Mais avec chacun un rendu différent : Canaletto s’attachant à rendre l’atmosphère éternelle, alors que Guardi exprime son aspect éphémère.
« Régate sur le Grand Canal depuis Ca’Foscari » vers 1777
Francesco GUARDI (1712-1793)
Lisbonne- Museu Calouste Gulbenkian
Mais en cette fin du XVIIIème siècle, une crise économique et sociale s’installe. Alors que Venise perd son attractivité commerciale, qu’une partie de la noblesse est ruinée, des fêtes toujours aussi somptueuses illuminent la ville.
Après un siècle de neutralité, l’Etat vénitien, qui a perdu toute emprise diplomatique, se retrouve isolé face à Bonaparte. Après l’avoir occupée et en partie pillée, Bonaparte cède Venise et ses territoires à l’Autriche le 17 mai 1797 (traité de Campoformio). Les feux vénitiens s’éteignent alors !
« Éblouissante Venise »
Jusqu’au 21 janvier 2019 au Grand Palais