JOAN MIRO : ARTISTE GÉNIAL, LIBRE ET INDÉPENDANT ! (2- Suite et fin)
III APRES 1945 ET SON GRAND ATELIER DE MAJORQUE
MIRO, à la fin de la guerre, retrouve la peinture avec une formidable vitalité. A son retour en Espagne, il peint en octobre 1945 « La Course de taureaux ».
« La Course de taureaux » 8 octobre 1945-Huile sur toile (114×144 cm)
Paris, Centre Pompidou – Musée National d’art moderne
En 1947, il part avec son épouse aux Etats Unis. Ce premier voyage outre Atlantique est un choc pour lui, peut-être comparable à celui qu’il a ressenti en arrivant à Paris en 1920. Il découvre avec éblouissement Manhattan, et son bouillonnement culturel trépidant et novateur. Bien que totalement séduit, il parvient à garder son cap, sans jamais perdre de vue sa personnalité.
les œuvres qu’il réalise à son retour sont reconnaissables grâce à leurs tracés noirs, épais et spontanés, à leurs points et à leurs cercles pour les yeux, à leurs arcs et à leurs croix pour les astres, à leurs signes verticaux et horizontaux pour les sexes et les oiseaux.… Il continue d’avancer !
« Le Soleil rouge ronge l’araignée » 1948
Huile sur toile (76×96 cm)
Monaco, Nahmad Collection
Son atelier à Majorque
En 1956, MIRO s’installe dans une villa de la banlieue de Palma de Majorque, à Son Abrines, où il fait construire l’atelier dont il a toujours rêvé. C’est l’occasion pour lui, en retrouvant ses anciennes œuvres, de faire son auto critique sur son travail passé. Il détruit certaines toiles, en retravaille d’autres, ce qui lui permet de s’engager dans de nouvelles directions.
Début 1960, il réfléchit à une série de tableaux bleus habités par une grande sobriété. En mars 1961, les trois toiles « Bleu I, Bleu II, Bleu III » sont achevées. Elles sont ses premières œuvres monumentales, et « l’aboutissement de tout ce que j’ai essayé de faire » résume MIRO. Il chemine vers l’essentiel.
« Bleu II » 4 mars 1961-Huile sur toile (270x355cm)
Paris, Centre Pompidou
Musée National d’art moderne
Sculptures
Toujours dans les années 1960, la sculpture fait son apparition dans son travail. Ses sculptures sont la continuité naturelle de la céramique et des formes qu’il avait alors créées en petits formats, comme l’Oiseau Solaire et l’Oiseau Lunaire (voir ci-dessous), dont la première version date de 1945. Elle était en bois et avait une hauteur de 30 centimètres. Et au fil des années ces pièces ont « grandi »….
« Oiseau lunaire » 1966
Bronze, Susse Fondeur, Arcueil, Paris, tirage 1/1 (130x115x85cm)
New York, Jeffrey H. Loria
En 1966, MIRO se lance dans une série de sculptures, empreintes de poésie, d’humour mais aussi d’un esprit contestataire. Pour les réaliser, il utilise des objets cassés, abandonnés, sans intérêt, mais susceptibles de métamorphoses. Puis il laisse exploser son imagination, sa fantaisie. Et à un moment, il dit stop : sa sculpture est aboutie.
« Femme assise et enfant » 1967-Bronze peint (121x43x47cm)
Saint Paul, fondation Marguerite et Aimé Maeght
Après l’assemblage d’une caisse et d’une fourche, par exemple, il crée en 1967 « Femme et Oiseau » (ci-dessous). Pour assembler en un volume et lisser ces différentes réalisations insolites, il les coule dans le bronze. Parfois MIRO recouvre ensuite certaines d’entre elles de couleurs pures ; sa façon personnelle de tourner en dérision la technique classique du bronze, qu’il trouve trop traditionnelle.
« Femme et oiseau » 1967-Bronze peint (257x83x55cm)
Saint Paul, fondation Marguerite et Aimé Maeght
IV EXPRIMER L’ESSENTIEL
Dans ses dernières années de création, MIRO veut exprimer l’essentiel. Vaste défi qu’il relève avec brio !
Pour y parvenir, il utilise l’humour, le défi, la provocation ludique… Il veut repousser ses limites, tout en s’engageant sur de nouveaux chemins. Des grands triptyques blancs ou azurés font alors leur apparition.
« Danse de personnages et d’oiseaux sur un ciel bleu. Etincelles » 25 mai 1968
Huile sur toile (173,6×291,6cm)
Paris, Centre Pompidou-Musée national d’art moderne
Un noir intense devient de plus en plus présent dans ses peintures, jusqu’à envahir la toile. Le blanc et le noir s’affrontent. Ses signes graphiques s’imposent. Il trempe ses doigts dans la peinture, peint avec ses poings, marche sur ses toiles, qu’il n’a pas hésité à bruler auparavant pour certaines.
Il laisse ainsi libre cours à son imagination créative et à sa liberté.
Le triptyque : « L’Espoir du condamné à mort »
« MIRO dialogue sans cesse avec la liberté. Elle s’impose de manière dramatique dans « L’Espoir du condamné à mort » » écrit Jean-Louis PRAT, Commissaire de l’exposition et ami de Joan MIRO, dans le catalogue de cette exposition (Catalogue MIRO « Ceci est la couleur de mes rêves »-page 19).
« L’Espoir du condamné à mort », triptyque de grand format, a été réalisé en 1974. Il sera le dernier de MIRO. La condamnation à mort par le régime franquiste de l’étudiant anarchiste catalan, Puig Antich, est à l’origine de ce dernier triptyque de MIRO.
Trois grandes toiles (2,5m sur 3,5m environ), des fonds blancs, des éclaboussures, des coulées, et une ligne noire, épaisse, qui incarne le visage vu de profil du condamné. Chacune de ces 3 toiles raconte dans une extrême sobriété, l’espoir de l’étudiant. Espoir qui diminue toile après toile.
« L’Espoir du condamné à mort II » 9 février 1974
Acrylique sur toile, 267x351cm
Barcelone, Fundacio Joan Miro
« Ce triptyque détermine un espace religieux, de méditation, de solitude, de silence. C’est une chapelle….. » expliquait MIRO quelques années plus tard. Il a fini la troisième toile, le jour de l’exécution de l’étudiant, le 9 février 1974.
Mort le 25 décembre 1983, à Majorque, Joan MIRO, a été un artiste extraordinaire. Il a travaillé toute sa vie, totalement habité par son instinct créatif, sa liberté, son indépendance, et, bien sûr, son immense talent qu’il a su faire fructifier et renouveler pendant 90 ans.
Rétrospective « MIRO »
Au GRAND PALAIS à Paris
Jusqu’au 4 février 2019